mercredi 2 décembre 2009

Le pays du sourire et des contrastes






Alors voilà. On a intégré tant de besoins qu'ils nous semblent tous vitaux. Dans un pays comme le Cambodge, on se rend compte qu'on a vraiment trop de choses, et qu'on passe beaucoup trop de temps coupés des nôtres pour acquérir tous ces biens superflus. L'intense activité et la vitalité qui existent à la ville comme à la campagne, les sourires et les rires omniprésents empêchent tout misérabilisme. Les Cambodgiens sont un peuple heureux. Ils vivent majoritairement à la campagne, où peu d'argent suffit.

Ici, à Phnom Penh, il y a beaucoup d'activités, de déplacements. Les gens travaillent tout le temps, mais différemment. Beaucoup du travail visible à la ville consiste à attendre le client, ce qui en soi n'est pas épuisant, surtout quand ça se passe en famille, à la maison. À la ville, et dans les petits bourgs le long des routes, les cafés sont remplis d'hommes. Il règne une certaine nonchalance, malgré le bourdonnement des motos omniprésentes.

À la campagne, il y a le dur travail des rizières, qui n'a pas changé depuis la nuit des temps et qui occupe la majeure partie de la population. C'est un travail collectif, rythmé par la pousse du riz qu'on repique, des mauvaises herbes qu'on arrache.

Ils possèdent leur maison bâtie souvent par eux-mêmes, en bois, en bambous, avec des toits de palmes. Ils n'ont pas de loyer à payer, l'eau n'est pas chère, l'électricité l'est un peu.

Le Cambodge est répertorié comme un des pays les plus pauvres, car les salaires sont vraiment bas (50$ pour un fonctionnaire, qui complètent par une corruption généralisée : professeurs, policiers se font payer en plus, c'est dans les moeurs). Mais 90% travaillent dans le secteur informel, et en campagne, où ils produisent leur nourriture; donc ils ont vraiment de très faibles besoins.

À titre d'exemple, Pat Bona, (voir À Kratie chez la famille Pat), le jeune garçon qui veut devenir docteur, doit payer 80 $ à l'année pour suivre les cours de chimie, physique et maths de Terminale. Ses parents lui ont donné 30 $ (son père est pêcheur en saison des pluies et vend de l'eau potable en saison sèche) donc il va travailler trois mois comme guide touristique pour compléter la somme. Quand je lui ai donné 10$ en coins américains que j'avais emportés et qui m'étaient inutiles (mon père avait fait la collec des coins des divers États américains et me les avait donnés avant de partir, j'ignorais que seuls les billets ont cours ici) en lui disant qu'il pourrait facilement les changer en billets grâce aux touristes qu'il fréquentait chaque jour, à ma surprise, il n'a pas été particulièrement content. Peut-être en doutait-il ? Ou le rapport à l'argent est différent ? Au Laos, dans un bus populaire, la femme en face de moi comptait et recomptait sans aucune discrétion des liasses de billets qui remplissaient son sac ! Qui ferait une chose pareille en Europe ou en Amérique latine ?

Si l'on va dans les bidonvilles (je n'y suis jamais allée, d'autres stagiaires visitant des gens pour une enquête sur le micro-crédit oui et m'ont raconté qu'il y a des situations très diverses : certains vivent dans des cahutes sur pilotis avec détritus et déjections en-dessous, mais d'autres vivent tout à fait dignement. La plupart des gens font des petits boulots pour un tout petit salaire. Les enfants sont nombreux à vivre dans les rues, beaucoup sont dans la rue avec leurs parents, trient les poubelles. Mais parfois on les voit rire ensemble, la joie semble plus forte. On voit certaines personnes misérables, mais on en voit autant chez nous. C'est assez difficile à expliquer. Il serait naïf de dire que tout va bien chez eux mais chez nous aussi, on a de graves problèmes à un autre niveau. Ici la plupart sont pauvres, ce qui fait qu'ils sont tous au même niveau, et la vie n'est pas chère. Chez nous, se loger, se nourrir coûte si cher, et on est vite exclus si on n'a pas de biens extérieurs.

Il n'y a relativement peu de chômage tel que nous le connaissons, il y a plein de petits boulots informels; mais avec la crise, des centaines de milliers d'ouvrières ont été licenciées.
Les ONG, très nombreuses au Cambodge, ne suffisent pas et servent à pallier le désintérêt de l'État, qui par exemple n'a pas jugé bon d'inscrire l'éducation au nombre des actions prioritaires pour le développement, comme le sont la santé ou l'agriculture... On peut toujours rêver et espérer un changement en 2010... Donc bien sûr, la situation est loin d'être toute rose, mais le Cambodge a de la ressource, il ne faut pas l'oublier.

Sur ce, à plus !

Insolite







Alors voilà. Avant de partir,en août, j'ai écrit cette rubrique fourre-tout sur toutes petites choses amusantes et inattendues que j'ai aperçues au Cambodge et au Laos.

CORPS

Grain de beauté : pour qu'il porte chance, il faut laisser pousser les poils, ce qui fait parfois une barbichette inattendue au milieu de la joue ! J'ai vu des hommes en porter, mais jamais de femmes (la coquetterie a dû l'emporter !).

Épilation : j'ai aussi vu des hommes s'arracher les poils de la barbe à la pince à épiler dans la rue en se regardant dans le rétroviseur ! Il faut dire qu'ils n'ont pas grand'chose en fait de poils...

Ongles
: toutes les femmes prennent grand soin de leurs ongles. Il y a des petits salons ambulants de manucure pour un dollar à tous les coins de rue. Elles aiment les avoir longs même aux doigts de pieds. Il y a des couleurs inattendues : jaune, vert, bleu. Et des fois des dessins dessus.
Les hommes aussi ont parfois les ongles longs, surtout l'auriculaire, pour se gratter l'oreille comme son nom l'indique...

Minceur
: c'est tout simplement écoeurant. Tout le monde est mince. On a l'air tous obèses à côté. Mais attention, les gens mangent, tout le temps un peu. Du riz à chaque repas, ou des nouilles, de riz aussi. Des petites brochettes, des currys délicieux, et j'en passe, de la bière et tout et tout. Mais ils restent tous minces...
Au Cambodge, une personne nous a dit qu'au Laos les gens sont plus gros à cause du riz gluant qui est une de leurs spécialités (en fait, il est pas gluant mais très collant, il se mange en boulettes roulées à la main) ! C'est vrai qu'on a vu plus de gens enrobés, mais bon, de là à incriminer la cuisson du riz... on ne s'avancera pas !

Cheveux
: ils se font moins de cheveux blancs ! C'est pas des blagues ! C'est très difficile de donner un âge aux gens, ils ont généralement l'air plus jeune qu'ils ne sont déjà ! J'ai parlé avec des personnes de 60 ans (par exemple la dame aux lobes élargis, portant des grosses boucles d'oreille, ci-dessous en photo, d'une ethnie qui a non seulement les lobes élargis mais les dents sciées à l'âge de 15 ans (!), mais les jeunes ne suivent plus la tradition) qui n'avaient pas un seul cheveu blanc (j'ai bien regardé les racines !).

Rides
: ils en ont moins aussi. Ils font facile 10 à 20 ans de moins que leur âge.
À quand le régime asiatique pour leur chipper leurs secrets de jouvence ???

HABITS

Pyjama : À Phnom Penh, on peut voir beaucoup de femmes en pyjama à motifs imprimés (des fleurs aux nounours), ça fait bizarre au début, on se dit : Tiens, encore une qui n'a pas eu envie de s'habiller aujourd'hui... et puis non ! Ce n'est pas considéré comme un pyjama, juste un vêtement confortable, voire joli (?).

Jupe
: Au Laos, même si certaines sont en jean ou en short, beaucoup de femmes portent la jupe traditionnelle tissée en soie descendant jusqu'à mi-mollet. En-dessous elles portent un caleçon. Très pratique pour faire pipi dans la nature aux arrêts de bus en particulier (le jean s'y prête moins !).

Tongs : la tong est LA chaussure. Même quand vous faites un trek de deux jours dans la montagne avec des bottes dans vingt cm de boue (vive la saison des pluies), en total aquaplanning, faisant un pas en avant deux pas en arrière, soit en montée soit en descente (les deux sont techniques), vous voyez arriver des Laotiens tout sourire, pieds nus, tongs à la main, semblant voler au-dessus du sol. Vous maudissez alors votre gaucherie de citadin habitué à son stupide asphalte anti-dérapant.

NOURRITURE


Petites friandises : Alors là, accrochez vos ceintures.Tout est très bon, varié et sain (je n'ai jamais été malade en 4 mois, en mangeant dans des endroits populaires). Mais il y a des petites fantaisies qui nous laissent perplexes. Cambodgiens et Laotiens font frire cafards, sauterelles, araignées (« Do you like spiders ? » me dit un jour une petite voix enfantine à une pause déjeûner en bus. Je me suis retournée, la gamine de 10 ans avait une mygale vivante sur l'épaule, qui allait passer à la casserole de friture ! Je suis remontée dans le bus plus vite que d'habitude !), mais aussi scarabées, rats au barbecue (éh oui, c'est au Laos qu'on en a vus) et même chauves-souris (on s'est demandé ce que c'était jusqu'à ce qu'on reconnaisse les ailes...) dans un marché à Muang Kua, Laos. C'est consommé comme des petites friandises, sans rien. Les intrépides qui ont goutté les sauterelles disent que ça a surtout le goût de l'huile... Avis aux amateurs. Dans le Nord du Laos, un voyageur nous a confié avoir été invité à un repas où on lui a servi du chien. C'est très goûtu, nous a-t-il dit, et dur... comme du chien !

La feuille de bananier : moyen écolo pour emballer la nourriture : petits gâteaux de riz au lait de coco, mais aussi poisson cru, etc. Le problème, comme on ne peut communiquer la plupart du temps (sauf pour les prix, les femmes savent souvent le dire en anglais), c'est que ça se transforme en pochette surprise, surprise désagréable quand on tombe sur du poisson cru au piment à la place du petit cake espéré...