lundi 29 juin 2009

Angkor magique



Petit Kirikou cambodgien avec sa mère devant le temple d'Angkor

Alors voilà. Comme je le disais dans mon précédent post, je ne suis pas en vacances. N'empêche, j'ai réussi à me faire de très jolies escapades ces deux derniers mois, chronométrées certes, puisque faites en un week-end, avec des trajets de 4-6h de bus juste pour un aller, mais quand même, ça valait le coup. À part Kratie, il y a eu les maisons flottantes à Kompong Chnang, la côte avec Kep et Kampot, l'écotourisme (cascade et nuit chez l'habitant) à Kompong Speu. Je posterai tout ça très bientôt.

Le site d'Angkor
Mais je commence par le clou du clou où je suis allée ce week-end : les fameux temples du site d'Angkor. 287 au total, rien que ça. C'est la merveille des vestiges de la riche civilisation khmère. Les temples sont tous très différents selon les époques; certains sont sous forme de pyramides et rappellent les temples mayas. Il y en a qui sont d'influence hindouistes et d'autres bouddhistes, mes préférées, les plus mystérieux. Partout, il y a des blocs de pierre hallucinants, et des bas-reliefs sur tous les murs ou presque. Et le site est magnifique, tout vert, avec des immenses arbres centenaires, tels que je n'en avais encore jamais vus dans le pays. Le tout a un enjeu touristique énorme (hotels de luxe à foison dans la ville, Siem Reap, qui a des jardins tout taillés, tout proprets, c'est joli mais sans âme; les droits d'entrée sont à 20 dollars la journée, 40$ les trois jours) et la situation est actuellement très tendue avec la Thaïlande qui voudrait se le réapproprier.
Moines faisant la queue au guichet du site
Pirouettes dans les douves du temple !
Angkor Wat
À bicyclette, passant des portes grandioses...
Temple pyramide de Ta Keo, costaud les marches...
Ta Keo
Minéral et végétal emmêlés
Celui que je voulais absolument voir est le Ta Phrom, qui a la caractéristique d'être envahi par des arbres gigantesques dont on sent qu'ils vont gagner la partie un jour contre la pierre tellement leurs racines s'insinuent dans les interstices et retournent des blocs pourtant imposants. Avec Renan, un copain rencontré à Phnom Penh, nous décidons de partir en vélo le matin à 7h pour le petit circuit (15 km, plus 5 pour aller en ville), pour être sûrs de ne pas être trop nombreux sur place. C'était magique, malgré quelques groupes de touristes asiatiques parlant fort et prenant les poses de rigueur (doigts en V, ils adorent ça).
Je suis conquise...
On n'est pas tout à fait seuls... Certains prennent la pose !

Le sourire du Bouddha
Le temple Bayon est le plus incroyable pour moi. Il y a 34 têtes (plus de 50 à l'origine) de plusieurs mètres à 4 faces, portant toutes le visage souriant de Bouddha. Une forêt de têtes, surplombée par une seule. Et des galeries et des terrasses qui les rejoignent. À l'intérieur de chacune, il y a une voûte, et un autel avec une statue du Bouddha, et des offrandes aujourd'hui encore (de l'encens principalement) et une corbeille pour mettre quelques billets en échange. À un endroit, il y a des femmes en habits de danse traditionnelle. Elles prennent la pose traditionnelle (doigts et pieds incurvés) pour la photo contre un dollar.
Bayon
Femmes en habits de danse traditionnelle venant de poser
Le sourire du Bouddha est contagieux
Renan aussi sait prendre la pose traditionnelle des danseuses !

Jeunes moines à Angkor Wat
Angkor Wat est le plus carré, le plus rationnel des temples pour moi; c'est une véritable forteresse, avec des douves larges de plus de 1000 m et de 2-3 m de profondeur où les enfants plongent, avec un système de portes qu'on franchit et qui fait découvrir à chaque fois de nouvelles tours pointues, de nouvelles galeries. Les moines sont nombreux à venir dans ce site sacré. On engage la conversation avec trois jeunes d'entre eux. Comme une femme n'a pas le droit de toucher un moine sinon il perd tous les biens acquis (le féminisme attendra !), je me tiens à distance respectueuse sur la photo, tandis qu'ils se mettent bras dessus-bras dessous spontanément avec Renan. Être moine au Cambodge n'est pas forcément quelque chose de définitif. Ça peut être simplement un passage initiatique, quelques mois avant le mariage. Le jeune en orange clair (il n'y pas de signification aux dégradés, c'est juste en fonction des goûts !) est moine depuis trois ans et semble très impliqué, et nous explique sa pratique très sérieusement, mais les deux autres rient comme n'importe quels jeunes.
Parfait dégradé
A l'intérieur d'Angkor Wat
Sympa les coiffures d'antan...
1h30, je dois repartir dare-dare, mon bus est dans une heure. J'arriverai à Phnom Penh 6 h plus tard, avec un siège restant désespérément incliné au maximum, mais avec aussi un voisin parlant anglais. Il me raconte qu'il fait ce trajet tous les week-ends, parce qu'il prend des cours du soir pour avoir un master en finances (il travaille dans une banque); tous les week-ends, il fait 12h de bus pour voir 24h sa femme et son petit garçon de 7 mois, Heng Heng (prénom chnois qui veut dire chanceux), et il compte faire ça plusieurs années. « C'est la vie », me dit-il. Il me dit qu'il aimerait venir à Paris pour voir la Tour Eiffel et l'Arc de Triomphe, peut-être dans vingt ans, me dit-il en riant, parce que c'est cher.

Voilà, Angkor c'est fini. À plus !

Mon stage en ONG

Bénéficiaires du micro-crédit (85 euros max) avec les caissiers



Traversée du désert

Alors voilà. Après un mois et demi de silence, I'm back. Pourquoi n'ai-je rien écrit pendant tout ce temps? Éh bien parce que une fois passé un mois et demi de découvertes, d'émerveillements, j'ai eu un petit passage à vide, je me suis sentie seulette, ben voui...Et comme de juste, c'est à ce moment-là que je me suis fait tirer mon sac, quand j'étais à vélo. Deux types sur une moto ont surgi, la moto a freiné, le mec de derrière m'a couru après. Le tout dans une rue déserte (chose rare, il était 20h), et complètement noire sur 20 m, alors que le début était illuminé et animé. Le flip... le sac (que je ne prenais jamais, il a suffi d'une fois !) a cassé facilement, c'est déjà ça. Mais la peur, elle, ne m'a plus lâchée pendant plus de dix jours. Et encore maintenant je regarde parfois ce qui m'entoure avec suspicion. Je suis une Barang, une étrangère, et cela fait de moi une poule aux oeufs d'or de facto, même si je roule sur un vélo pourri et que j'ai 10 dollars sur moi. Après, tout le monde m'a bien sûr raconté tous les vols qui s'étaient produits dans les six derniers mois....le record : une fille qui s'est fait piqué son sac 6 fois en 2 ans ! En tuk-tuk, en moto, en vélo, devant chez elle...Donc, tout mettre dans ses poches, ou porter un sac à dos, pas de petit sac le soir.Il a suffi qu'une fois je manque de vigilance. Évidemment cela gâche le plaisir, mais bon cela peut arriver partout.

Donc ce mois dernier a été surtout occupé par le boulot, ce qui est logique, c'est pour cela que je suis venue !

Mon stage en ONG

En quoi consiste mon stage? C'est toujours un peu long à expliquer, alors pour ceux qui ne sont pas intéressés, sautez cette partie !
Je suis en stage chez Entrepreneurs du Monde, association de micro-crédit dont le siège est à Poitiers, qui est implantée dans divers pays dans le monde. Il s'agit de tout petits crédits (200$ maxi) pour des gens qui vendent leurs produits sur le marché ou dans la rue.
Ma mission (ce terme me fait immanquablement penser à la formule des films d'espionnage de série B : « Votre mission , si vous l'acceptez, est de libérer le Pentagone de dangereux terroristes. Ce message s'autodétruira dans 5 secondes. »), bref je disais ma modeste mission est d'identifier les besoins des étudiants issus de centres de formation professionnelle de Phnom Penh pour lancer leur petit business (petit salon de coiffure, atelier de réparation mécanique, etc.).
J'ai d'abord fait , les deux premiers mois, une évaluation d'une formation existante (« Business curriculum »), à Friends International, qui s'occupe d'enfants des rues, jusqu'à l'âge de 24 ans. La philosophie de cette ONG devenue entreprise sociale (cela veut dire que diverses activités -restaurants, boutique, salon de beauté- servent de lieux d'apprentissage pour les étudiants et génèrent des revenus; l'idée est de devenir indépendant à terme et de tourner en autonomie sans financement extérieur), sa philosophie donc est de réintégrer les jeunes dans leur famille, dans des écoles, pas de les garder à part. Il y a des ateliers pour apprendre un métier de façon pratique. La durée d'apprentissage est souple, elle dépend des capacités de l'étudiant et de la compétence technique à acquérir.

Interviews d'étudiants
Avec Dany, ma collègue khmère chargée de l'évaluation, une fille intelligente et drôle, qui souhaite aller faire un master en Australie ou aux États Unis, nous avons interviewé 22 étudiants et anciens étudiants ayant assisté au Business Curriculum, cours de 25 heures, qui parle du monde de l'entreprise, qui aborde des notions telles que le business plan, le marketing, le budget, connaître ses capacités, écrire un CV, etc.
C' est intéressant de voir leurs rêves. À terme, tous veulent travailler à leur compte. C'est normal, le travail informel occupe 90% de la population active dans le pays, dans les campagnes, c'est l'agriculture, et dans les villes, c'est des petits businesses familiaux, la boutique ou l'atelier est souvent la maison même, ou alors est dans la rue.
Mais la plupart ne sait de quoi il en retourne exactement. Il n'y a souvent pas de distinction entre l'argent pour les dépenses personnelles et pour le business.Ils savent à peu près combien ils gagnent par jour. Par contre ils sont plus forts que nous en calcul mental, me disait Phalkun, la responsable des formations (à part mon boss, tout le monde est Khmer ici, l'agence, appelée Chamroeun (« le progrès ») est dirigée par un Khmer aussi; Entrepreneurs du Monde supervise, coordonne). Il n'y a souvent pas la notion de force de travail non plus, de toutes les dépenses à soustraire pour savoir quel est le profit réel. C'est pour cela qu'une agence de micro-crédit fait aussi beaucoup de formations, pour apprendre aux gens à gérer leur argent, et donc savoir combien emprunter, comment épargner, pour mieux rembourser, et faire des plans d'avenir et d'expansion.
Les jeunes que j'ai interviewés ont un niveau de scolarité équivalent en moyenne à la 5ème, mais il y en a aussi qui ont le bac et plus. En effet, d'autres ONG, tels que Enfants du Mékong, veulent former des jeunes de haut niveau, et certaines formations sont ouvertes à d'autres étudiants donc j'ai parlé aussi à des étudiants des universités. Ces dernières poussent comme des champignons, mais l'enseignement n'y est pas toujours de qualité, et on peut même parfois acheter son diplôme ! L'exemple le plus frappant parmi ceux qui ont répondu au questionnaire était un étudiant en Master de finances qui avait pour ambition d' « ouvrir une banque », en toute simplicité, avec « 100.000 $ » comme capital de départ, provenant... d' « économies personnelles », ben voyons! Et le pire, c'est qu'il ne voyait pas où était le problème...

En même temps, mon travail était de contacter d'autres centres de formation pour savoir s'ils avaient déjà ce type de formation, et s'ils avaient des étudiants intéressés par l'auto-emploi que nous pourrions interviewer.

Entrer en contact avec les gens, c'est du sport !

Ce travail de contact a été incroyablement lent. N'ayant pas de contacts personnels, j'ai dû écrire des mails, avoir des conversations de sourds surréalistes, me faire raccrocher au nez au téléphone parce que la personne ne comprenait pas l'anglais. Puis peu à peu, j'ai obtenu des cartes de visite, des noms sur qui fait quoi. Et tout de suite, c'est allé beaucoup mieux. Mais souvent, j'ai eu affaire à plusieurs personnes dans la même organisation avant d'arriver à avoir les infos que je recherchais !

Sans compter les déplacements pour les rendez-vous. D'abord, comprendre où se situe le centre de formation sur la carte de la ville. D'accord c'est quadrillé avec des numéros, mais c'est pas si simple, sinon ce serait pas le Cambodge ! Il y a des quartiers, et il faut pouvoir prononcer les noms. Les moto-dop ne savent pas lire une carte, notre prononciation les déroute. Il faut pouvoir donner un repère (genre un marché), et lui faire des signes pour aller à gauche à droite, ce qui est difficile quand on y est jamais allé. Le plus souvent on tourne, on tourne. Quand on trouve toujours pas et que je comprends qu'on est paumé (80% des cas), j'appelle quelqu'un du centre en question et je passe le portable au moto-dop. Une fois, j'en ai eu tellement marre que j'y suis allée en vélo, mais pas de pot, je me suis trompée d'antenne! Après j'ai pris une moto pour arriver quand même au rendez-vous, le gars ne trouvait pas, il s'est mis à pleuvoir...J'ai dit au gars de faire demi-tour. Des fois, faut savoir lâcher prise !

Sur ce, à plus!



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